Une partie de pouilleux ! Si une image peut résumer l’épopée centenaire du Jardin à Auvers, c’est bien celle-là.
L’histoire du Jardin, devenu par quelque avatar de l’histoire de l’art un « monument historique », s’apparente au jeu de cartes, autrement dénommé « mistigri », plus rarement « le puant », dans lequel tout l’art du bluff consiste à mettre en valeur la carte qui n’est pas appariée pour jeter le trouble dans l’esprit de celui qui doit piocher et qui perdra la partie s’il la conserve.
Le Jardin a quitté la mère patrie en 1901 pour la Hollande, expédié, sous prétexte d’échange, par un adepte de magie et d’ésotérisme se défaussant d’une oeuvre empruntée à son ami collectionneur et peintre. Le jeu n’a plus cessé, la mise montant à chaque tour, parfois retourné à l’envoyeur et puis encore, et encore, parfois repris par un cousin, parfois, réclamé par le joueur précédent, parfois partagé par des frères ennemis. De retour en France le Jardin maudit a fini par échouer entre des mains qui ont cessé de trouver le jeu drôle quand elles ont voulu sans succès s’en défaire. Les joueurs ont réclamé que l’on reprenne la fausse carte pour ne pas se retrouver tout à fait perdants.
On les rassura en disant qu’ils pourraient, avec un peu de patience, toujours le refiler à quelqu’un d’autre. Devant leur insistance, tous recours épuisés, on leur opposa un : « Tu le voulais, tu l’as ! ».
A chaque fois l’histoire avance d’un cran. Saga.